Il y a plusieurs années, aux débuts de l’histoire de l’humanité, on laissait aux religions l’entière responsabilité de fournir aux individus des explications quant aux questions existentielles qui se posaient à eux.
D’où vient la vie? Comment l’être humain est-il apparu sur Terre? Quelle est sa mission dans ce monde? Que se passe-t-il après la mort? Beaucoup de questions les plus angoissantes les unes que les autres.
Les religions apportaient réconfort, espoir et confiance en la vie en donnant aux diverses problématiques des réponses et elles le font toujours d’ailleurs. On croyait en avoir trouvé quelques-unes en s’appuyant sur les différentes religions, éclaircissant ainsi ces questionnements à leur propre façon selon la croyance adoptée.
Puis la science surgit et vint chambouler les connaissances que l’on croyait acquises. Aujourd’hui, l’histoire est bien étoffée pour permettre de répondre à l’interrogation « d’où venons-nous? » Entre autres grâce à la théorie de l’évolution de Darwin, mais subsistent encore d’importants chaînons manquants à travers la quantité phénoménale d’éléments expliqués par la science.
Qu’en est-il de l’énigmatique esprit, son rapport avec son support physique, le cerveau, et le mental dans tout ça?
La neurothéologie est une discipline relativement nouvelle qui gagne à être connue, car elle fournit des informations des plus intéressantes à propos de sujets intrigants et peu explorés par la science! C’est pourquoi cet article survolera les grandes lignes de découvertes fascinantes dans ce domaine.
La révélation inusitée
Tout d’abord, il semble nécessaire de mettre en place les bases du sujet, et quoi de mieux pour cela que d’utiliser les travaux d’Andrew Newberg et Eugene d’Aquili1, professeurs aux départements de radiologie, des religions et de psychiatrie de l’Université de Pennsylvanie. Dans leur livre intitulé Pourquoi Dieu ne disparaîtra pas, les deux chercheurs ont effectué plusieurs expériences, entre autres une avec un pratiquant de la méditation tibétaine.
À l’approche de l’apogée de l’intensité spirituelle de sa séance de méditation, c’est-à-dire au moment de sa transcendance, le méditant avait pour tâche de tirer sur un fil.
Cette action donnait à Newberg et d’Aquili le signal pour injecter un produit radioactif dans son corps et leur permettait ensuite d’avoir des images par tomographie à émission monophotonique montrant les zones neuronales les plus activées.
En observant le résultat de leur expérience, ils ont pu voir une région inhabituelle activée : le cortex pariétal supérieur arrière1 (p.12-14). Cette zone du cerveau travaille pour orienter l’individu dans l’espace physique, elle permet de délimiter ce qui fait partie de soi ou non, donc la sensation de limite entre le corps et l’espace, ce qui l’entoure. Ce qui est surprenant, c’est que l’activité détectée n’était pas excitatrice des neurones, mais bien inhibitrice, donc diminuée.
En même temps, ils ont aussi observé une réelle augmentation de l’activité cérébrale au niveau des lobes frontaux. Cette région est reconnue pour être le siège des fonctions exécutives, entre autres de l’attention et de la concentration.
Selon leurs hypothèses, c’est l’activité intense de cette partie du cerveau qui, grâce à la concentration que procure la méditation, permet la naissance d’une capacité à bloquer l’entrée de l’influx nerveux dans ce qu’ils appellent l’aire de l’association pour l’orientation, dans le lobe pariétal1 (p.276).
Ainsi, à force de concentration, le cerveau réussirait donc à contrôler la circulation de l’information dans l’aire pariétale. En l’empêchant tout simplement d’atteindre cette partie de l’encéphale, les lobes frontaux travailleraient pour diminuer l’activité de la zone responsable du sentiment d’habiter un corps dissocié de l’espace dans lequel il évolue.
Par conséquent, c’est ce mécanisme qui serait à l’origine des sensations éprouvées lors de l’expérience de transcendance. Ce serait là une première découverte fascinante quant aux capacités inconnues du cerveau, soit, dans ce cas-ci, la capacité à gérer soi-même l’activité de la matière cérébrale!
La transcendance
À cette étape-ci, on ne peut que contempler ces informations et se demander, mais qu’est-ce que cette étrange expérience appelée la transcendance? C’est la partie mystique de l’expérience spirituelle ou religieuse.
Une définition uniformément acceptée par toutes les religions à travers le temps inclut la notion d’un sentiment d’union spirituelle authentique1 (p.150-151).
Toujours selon ces chercheurs, elle serait caractérisée par de fortes émotions contradictoires ainsi que par la conviction de s’être élevé au-dessus de l’existence matérielle.
Selon une étude de Travis et Pearson2 rapportée dans un article de Travis3, une analyse de contenu a été effectuée sur des descriptions d’expériences de méditation transcendantale. Ils ont recueilli les témoignages de 52 étudiants du collège, ayant entre quelques mois à huit ans de pratique, et ont fait ressortir trois thèmes récurrents.
Ils ont repéré l’absence de temps, d’espace, et de conscience du corps. La combinaison de ces trois sensations découle directement des processus qui s’enclenchent dans le cerveau au cours de la méditation.
En effet, en se référant aux informations recueillies par Newberg et d’Aquili et Travis et Pearson, on peut y voir un lien. La fonction d’orientation et de définition de la limite du soi/non-soi de la zone cérébrale inhibée permet de comprendre l’impression que la barrière distinguant le soi et l’Univers se dissipe. Alors que de l’autre côté on retrouve la confirmation avec les éléments d’absence d’espace et de conscience du corps qui sont ressortis à travers les entrevues.
Pour ce qui est de l’absence de temps, elle pourrait être expliquée par le fait qu’au moment de la transcendance la conscience est altérée. L’hypothèse probable pourrait donc être que l’expérience de transcendance entraîne une perception du temps semblable à celle que la perte de conscience procure. En se référant au tableau que l’on trouve dans l’article de Travis, on peut mieux cerner le concept de l’état de conscience provoqué par l’expérience transcendantale.

Le tableau croisé ci-haut représente les résultats au niveau de l’état de conscience provoqué par les différentes valeurs des deux variables en jeu : tout d’abord, la présence ou l’absence de contenu dans les pensées, puis la présence ou l’absence de conscience de soi.
Lors du sommeil, il n’y a ni pensées ni conscience de soi; lorsque l’individu rêve, il n’y a pas plus de conscience de soi, mais une panoplie d’images et de pensées apparaissent dans le cerveau. Lors de l’état d’éveil, il y a conscience de soi et le contenu de la pensée est varié, ce qui laisse l’état où il y a conscience de soi, mais aucun contenu de pensée. C’est précisément cet état qu’on appelle la conscience pure, ou la conscience transcendantale, le niveau de conscience lors de l’expérience mystique.
À cette étape de la méditation, on dit que l’individu transcende la dichotomie sujet-objet qui caractérise l’état d’éveil, puisqu’il devient à la fois le sujet et l’objet de l’expérience3. Toutes les informations semblent donc éclairer dans la même direction, soit une fusion à la totalité de ce qui existe à travers le temps et l’espace.
En conclusion
Grâce à la neurothéologie, on commence à voir un plan se dessiner, avec l’accumulation d’études sur le sujet, on arrive de mieux en mieux à cerner ce monde mystérieux que représente la religion aux yeux de la science.
En effet, en combinant les perceptions subjectives des sujets, c’est-à-dire les témoignages de leurs expériences, avec les données objectives des images obtenues par la tomographie, exposant les différentes zones neuronales excitées et inhibées, on peut conclure que le cerveau rend l’expérience de transcendance réelle aux plans biologique, de manière observable et scientifique1 (pp.18-21).
Tel que mentionné dans son épilogue, Newberg définit le but de cette discipline comme étant de « […] comprendre le lien entre le fonctionnement du cerveau et tous les aspects importants de la religion. »
De plus, ce champ d’études devrait aussi explorer les caractéristiques plus communes du comportement religieux : « […] les idées sur la communauté, la famille, la mortalité, l’amour, la dévotion, le pardon, le sentiment d’appartenance et le sentiment de faire partie de quelque chose de plus grand que soi. »1 (pp.256-257).
Il reste encore beaucoup à découvrir dans cette récente branche de la science, et le chemin vers la connaissance de cet univers s’annonce captivant et encore plus surprenant qu’il ne l’est déjà. Évidemment qu’avec la complexité de l’être humain et de son cerveau, la nature n’a pas encore fini d’impressionner à travers les trouvailles quant aux capacités cérébrales et physiques! Des recherches sont même déjà en cours pour mieux comprendre le lien entre la pratique religieuse et la santé, et bien plus reste à venir!
Gaia
Pour davantage d’explications des principes spirituels à travers des lunettes scientifiques, je vous invite à consulter la plateforme de documentaires Gaia! J’ai été absolument abasourdie d’apprendre comment on peut expliquer et observer des phénomènes plus abstrait tels que ceux abordés par la spiritualité. Par exemple avec la série Missing Links par Gregg Braden ou Rewired par Joe Dispenza où vous trouverez d’intéressants appuis scientifiques dans la physique quantique!
Références
- Newberg A, D’Aquili EG. Pourquoi Dieu ne disparaîtra pas : Quand la science explique la religion, France, Éditions Sully, 2003
- Travis, F. & C. Pearson. 2000. Pure consciousness: distinct phenomenological and physiological correlates of “consciousness itself.” International Journal of Neuroscience, 100, pp. 77–89
- Travis F., Transcendental experiences during meditation practice, Annals Of The New York Academy Of Sciences, Janvier 2014, 1307, pp. 1-8.